Structure architecturale la plus imposante des Bassins à flot de Bordeaux, la base sous-marine construite par les Allemands est l'une des six réalisées en France pendant la Seconde Guerre mondiale.Dès le début du conflit, Bordeaux avait été choisi par les Italiens comme base pour leur flotte "Betasom" de sous-marins (le préfixe grec « bêta », en référence à la "B" de Bordeaux, « som » étant l'abréviation de sommergibili, sous-marin en italien). Depuis cette base, les sous-marins ont participé de 1940 à 1943 à la Bataille de l'Atlantique dans le cadre de la campagne anti-expédition contre les Alliés. Les Allemands aussi ont vite montré de l'intérêt pour l'emplacement stratégique de la ville, loin des lignes de front et idéalement positionné pour les opérations dans l'océan Atlantique.
À l'été 1941, l’amiral Dönitz prend la décision de construire un bunker de protection à Bordeaux, les travaux de construction commencèrent en septembre de cette même année. En octobre 1942 les premiers sous-marins allemands sont arrivés et la base est devenue le port d’attache de la 12e Unterseebootsflottille de 42 sous-marins à très longue portée. Ensuite l'activité de la base a accueilli mouilleurs de mines, transports de torpilles et croiseurs. Certains des plus longs voyages de la guerre sont partis de Bordeaux, y compris une patrouille de 225 jours qui s'est achevée en octobre 1943. Après la capitulation italienne en septembre 1943, cinq de leurs sous-marins sont passés sous commandement allemand.
La 12e Unterseebootsflottille a été dissoute le 25 août 1944 avant
l'arrivée des forces alliées. Trois sous-marins ont réussi à s’échapper
vers l'Allemagne et la Norvège et ont été affectés à d'autres flottes. À
la base il restait seulement deux sous-marins qui avaient été sabordés.
La
taille de la construction est ahurissante. Le bunker, qui couvre une
superficie totale de 43 000 mètres carrés, fait 245 mètres de long, 162
mètres de large, 19 mètres de haut et une grande partie de son toit est
une quasi-indestructibles dalle de 9,20 mètres d'épaisseur. 600 000
mètres cubes de béton ont été utilisés pour le construire.
Il y a onze bassins couverts. Les quatre premiers sont des bassins à flot, faisant 20 mètres de large et 106 mètres de long ; chacun pouvait contenir deux-marins. Les alvéoles 5 à 11 font 14 mètres de large, et vont de 96 à 104 mètres de longueur. Chacun pouvait abriter un sous-marin et servir de cale sèche grâce à de puissantes pompes.
Les travaux de construction du bunker ne se sont terminés qu'à l’été 1944 et auraient nécessité jusqu'à 6 000 travailleurs, des prisonniers de guerre principalement espagnols et portugais, qui ont travaillé sans relâche jour et nuit dans des conditions effroyables. Beaucoup sont morts d'épuisement ou noyés, bien qu'il ne faille pas croire la légende urbaine soutenant que d'autres seraient tombés dans les fondations du bâtiment où ils ont péri prisonniers du béton. Un mémorial a été érigé en hommage à ceux qui ont pris part à la construction, et en particulier à ceux qui ont laissé leurs vies.
Aujourd'hui, les alvéoles sont d’envoûtantes coquilles vides, parfois utilisées par les plaisanciers travaillant sur leurs bateaux. Des parties du bâtiment sont utilisés pour des manifestations culturelles (théâtre, expositions et concerts), mais il semble que le lieu ne se débarrassera jamais totalement de son lourd héritage de guerre.
Il sera toutefois intéressant de revenir dans ce quartier dans les années à venir car la ville de Bordeaux cherche à développer et urbaniser les docks avec un environnement attrayant pour travailler, se reposer et se détendre. Le premier projet phare, la Cité du Vin, y a vu le jour en 2016.
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