À l'instar des villes de Paris et de Toulouse, Bordeaux s'inscrit dans une tendance paneuropéenne en transformant une petite parcell...

Aux arbres, citadins : à la découverte de la première micro-forêt bordelaise


À l'instar des villes de Paris et de Toulouse, Bordeaux s'inscrit dans une tendance paneuropéenne en transformant une petite parcelle du centre-ville en une mini-forêt. Il est temps de se promener dans – ou du moins à côté du – plus petit des bois ! 


C’est encore tout frais : cette première mini-forêt bordelaise en devenir a été inaugurée par le maire, Pierre Hurmic, au mois de mars 2021. Elle est située entre la gare Saint-Jean et l'église du Sacré-Cœur, sur l'espace triangulaire où se croisent les rues Billaudel, Fieffé et Francin. 


Alors, de quoi s'agit-il ? Selon un article publié par The Guardian, de minuscules forêts denses comme celle-ci « apparaissent dans toute l'Europe dans le cadre d'un mouvement visant à restaurer la biodiversité et à lutter contre la crise climatique ». Leur format et leur concept « sont basés sur le travail du botaniste japonais Akira Miyawaki, qui a planté plus de 1 000 forêts de ce type au Japon, en Malaisie et ailleurs ». En France, le paysagiste Gilles Clément est également cité comme une influence clé, notamment en lien avec son concept du « jardin en mouvement », mais au niveau international, le terme « forêt de Miyawaki » est bien le terme consacré pour ce type de micro-forêt urbaine. 


Le futur : vue d'artiste de la micro-forêt d'ici quelque temps (source : bordeaux.fr).
Le présent : voici à quoi ressemble l'espace aujourd'hui (août 2021).


En se référant à la page Wikipédia consacrée à Akira Miyawaki (décédé en juillet 2021) il est possible de s’approprier les grandes lignes. Cette méthode Miyawaki est basée sur la reconstitution de « forêts indigènes en employant des arbres indigènes », ces jeunes arbres étant plantés très près les uns des autres, en veillant à utiliser une gamme diversifiée d'espèces afin de recréer les multiples couches d'une forêt naturelle. En outre, cette pratique « produit une forêt pionnière protectrice riche, dense et efficace en 20 à 30 ans, alors que la succession naturelle nécessiterait 200 ans dans le Japon tempéré, voire 300 à 500 ans sous les tropiques ».


Plus près du 45e parallèle, ici à Bordeaux, où le nouveau maire est bien sûr membre du parti politique Europe Écologie-Les Verts, cette mini-forêt est l'un de plusieurs projets de ce type et s’inscrit dans un programme plus vaste visant à apporter plus de verdure dans le centre-ville, baptisé « Bordeaux Grandeur Nature ». Lors de l'inauguration de la forêt en devenir, M. Hurmic a notamment déclaré aux médias que « C’est une plus-value pour tout un quartier, il y a une obligation de créer des îlots de fraîcheur », rappelant qu' « un espace de 100 m2 de forêt réduit de 1°C la température dans les rues adjacentes ».


Le passé : à voir actuellement sur GoogleEarth, les places de stationnement qui ont été supprimées.


Ce premier projet bordelais, qui s'étend sur une superficie de 180 m² pour un budget d’environ 50 000 €, comprend plus de 500 plantes et arbustes forestiers, dont des variétés d'arbres telles que des chênes pubescents, des sorbiers domestiques, des érables champêtres, des merisiers et des cornouillers sanguins. L’espace a été baptisé du nom de Wangari Muta Maathai en l'honneur de la militante kenyane, prix Nobel de la paix 2004, qui a contribué à la reforestation de son pays. 


Sur place par un dimanche matin tranquille, la première impression est celle d'un terrain désordonné, mais on comprend vite que cet aspect est tout à fait voulu. En effet, le processus de plantation est censé être aléatoire, et la forêt naturelle se formera au fur et à mesure que la sélection naturelle entre les semis permettra aux mieux adaptés de s'épanouir et de se développer rapidement. Par contre, pour l'instant, rien ne dépasse les 60 ou 70 centimètres de hauteur et il est donc difficile d'imaginer que, dans quelques années, plusieurs arbres domineront la place. 

 


Mais la mini-forêt apporte déjà une touche de couleur au quartier. Outre l’incontournable vert, des taches de blanc, de jaune, d'orange et de violet sont parsemées ici et là. Et bien sûr, après avoir admiré la vue initiale, on est tenté de regarder de plus près et de se concentrer sur certaines plantes, et c'est alors que l'on découvre que l'endroit a déjà bel et bien pris vie, avec des guêpes ou des abeilles qui collectent le pollen, des mouches et des papillons qui se faufilent entre les feuilles et les branches. Je me suis soudainement trouvé attiré par les plaisirs de la macrophotographie en milieu urbain, une véritable première ! 

 

Des scènes du quotidien dans le centre-ville de Bordeaux.


Quelques panneaux d'information complètent la vue et, pour l'instant du moins, les piquets de la clôture en bois sont surmontés d'une multitude de rouleaux de papier toilette décorés de manière experte et créative, probablement par les enfants d'une école du quartier. L'endroit est calme, si ce n'est le bourdonnement de ces insectes volants, ce qui rend la mini-forêt très active. C'est inhabituel et, somme toute, assez chouette.  

 


Les retombées médiatiques semblent indiquer que la plupart des riverains ont chaleureusement accueilli l'initiative, même si certains ont intuitivement râlé à propos de la douzaine de places de parking sacrifiées, et d'autres ont été cyniques quant au temps qu'il faudrait à la mini-forêt pour atteindre sa maturité. Mais à une époque où il ne se passe pratiquement pas un jour sans que l'on apprenne une nouvelle catastrophe naturelle ou un événement météorologique extrême, tout ce qui peut être fait pour lutter contre le rouleau compresseur du changement climatique doit être salué...

 

> Localiser sur la carte Invisible Bordeaux : Micro-forêt Wangari Muta Maathai, rue Fieffé, Bordeaux.

> This article is also available in English!

> Davantages d'informations sont à retrouver sur le site internet de la ville de Bordeaux. 

> Ci-dessous, un reportage vidéo Sud Ouest tourné lors des premières plantations en mars 2021, comme quoi tout a beaucoup poussé en l'espace de cinq mois !



Cliquer ici en cas de problème d'affichage sur votre appareil.


0 commentaires:

Il y a quelque temps, je me suis procuré un livre intitulé " Chaban de Bordeaux " pour un euro symbolique à la librairie Quai des ...

'Chaban de Bordeaux', d'hier à aujourd'hui


Il y a quelque temps, je me suis procuré un livre intitulé "Chaban de Bordeaux" pour un euro symbolique à la librairie Quai des Livres, cours Victor-Hugo, dans le centre-ville. Dans ce livre, publié en 1996 par les Éditions Sud Ouest, l'auteur, le regretté journaliste politique Pierre Cherruau, se concentrait sur le volet bordelais de la vie et de la carrière de Jacques Chaban-Delmas, qui fut maire de la ville pendant pas moins de 48 ans, de 1947 à 1995, cinq ans avant sa mort en 2000, à l'âge de 85 ans.

Ces années d'après-guerre et des Trente Glorieuses ont été une période charnière pour la ville. Tant de choses ont changé sous son impulsion, que ce soit en matière de logement (refonte du quartier de Mériadeck, création du Grand Parc, des lotissements des Aubiers et de la Benauge), d'infrastructures (inauguration des ponts Saint-Jean et Pont d'Aquitaine, construction de la Rocade), de culture, et bien d'autres choses encore.

Au cours de ces années, en tant que député, il a également occupé plusieurs fonctions ministérielles nationales, a présidé l'Assemblée nationale pendant deux mandats, a été Premier ministre de 1969 à 1972 et candidat à la présidence en 1974. Bref, une sacrée carrière !
 

Le livre contenait un certain nombre de superbes photos d'archives. J'ai pensé qu'il serait amusant de partir à la recherche des endroits où ces photos ont été prises et, avec un petit coup de pouce de Photoshop, d'essayer de fusionner le passé et le présent en des clichés uniques. Et voici ce que cela donne !   

 

 

Ci-dessus, on voit le jeune maire se promener nonchalamment dans la ville. L'emplacement, allées de Tourny, est celui où un photographe de rue capturait souvent les passants avec son objectif, de sorte que de nombreux Bordelais ont des photos similaires les montrant marchant dans cette même rue vers la fin des années 1940 et le début des années 1950 ! Auteur de la photo originale inconnu. Merci à Patrick Forsans, Caroline March, Bruno Montamat et d'autres pour avoir aidé à identifier l'emplacement exact de la photo.



En 1949, la place précédemment connue sous le nom de place des Salinères (et place de Bourgogne auparavant) est officiellement inaugurée sous le nom de place Bir-Hakeim, en référence à la bataille de Bir Hakeim pendant la Seconde Guerre mondiale. Chaban-Delmas avait invité le Général Charles de Gaulle à cet événement. À l'époque, De Gaulle était quelque peu en retrait, bien qu'il était en train de créer son parti politique, le Rassemblement du Peuple Français, qui se scindera plus tard en plusieurs groupes, dont l'Union pour la Nouvelle République, qui soutiendra De Gaulle lorsqu'il sera élu président de la République française en 1958. Auteur de la photographie originale inconnu. (Dans le livre "Chaban de Bordeaux", une autre photo de cet événement est présentée, mais il a été difficile de la reproduire. Cette photo similaire a été prise quelque part sur Internet... mais je ne me souviens plus où !).

 

 

Le président nouvellement élu De Gaulle est de retour à Bordeaux en 1958. On le voit ici remonter le cours du Chapeau-Rouge en compagnie de Chaban-Delmas et de diverses personnalités, dont le chef de cabinet de De Gaulle, Olivier Guichard (à gauche de Chaban), le garde des Sceaux Michel Debré (à droite de De Gaulle) et le préfet de Gironde et d'Aquitaine Gabriel Delaunay (portant la casquette à gauche). Auteur de la photographie originale inconnu.

 


D'accord, vous allez devoir me croire sur parole, mais Jacques Chaban-Delmas est l'une des figures qui se tient derrière le conducteur à bord de ce dernier tramway de première génération qui a parcouru Bordeaux en 1958, y compris ce tronçon de la place de la Victoire qui était remplie de spectateurs un brin nostalgiques. Chaban était heureux de tourner la page tramway de la ville, ouvrant la voie aux années tout-automobile des 1960, 70 et 80, ère à laquelle la ville se devait d'imaginer une nouvelle solution de transport public. Le système de métro léger "VAL" est alors le choix préféré de Chaban, mais ne verra jamais le jour. Finalement, l'une des premières grandes décisions du successeur de Chaban, Alain Juppé, fut de concevoir le réseau de tramway de nouvelle génération qui fait aujourd'hui partie intégrante de la ville. Crédit photo d'origine : Vincent Olivar.



Jacques Chaban-Delmas, alors premier ministre, fait campagne rue Sainte-Catherine en 1970, à peu près à l'époque où un rival politique émergent, le journaliste et magnat de la presse Jean-Jacques Servan-Schreiber, l'avait défié lors d'une élection législative partielle, sans doute dans l'optique d'affronter ensuite Chaban aux élections municipales. Chaban en sort victorieux mais se serait senti très menacé par "JJSS", même s'il a minimisé cet épisode plus tard dans sa vie. Auteur de la photographie originale inconnu.

 


Voici Jacques Chaban-Delmas qui monte en courant les marches vers le Palais Rohan, côté jardin de l'Hôtel de Ville. Dans le livre de Cherruau, la légende affirme que Chaban montait les marches quatre par quatre. Au sens propre du terme ? À l'arrière-plan, Robert Boulin, maire de Libourne et ministre français de la Santé à l'époque, essaie de suivre le rythme. Boulin a occupé de nombreux postes gouvernementaux au fil des ans, mais sa mort en 1979 est entourée de mystère et de controverse. Crédit photo d'origine : Michel André.  

 

 

Cette photo a vraisemblablement été prise le jour de l'inauguration officielle de la toute nouvelle rue piétonne Sainte-Catherine en septembre 1976. Le conducteur de la "deuche" n'a manifestement pas suivi l'actualité et se fait peut-être gentiment disputer par le maire de Bordeaux ! Crédit photo d'origine : Michel Lacroix. 

 


Ici, Jacques Chaban-Delmas salue les habitants du quartier des Aubiers en juin 1984, à la suite d'importants travaux de rénovation effectués à une époque où le quartier est passé tout près d'une explosion sociale. Comme nous l'avons mentionné dans les paragraphes précédents, les Aubiers sont l'une des nombreuses cités qui symbolisent, elles aussi, l'héritage de Chaban. Les Aubiers sont situés au nord de la ville, non loin du quartier du Lac, lui aussi héritage du mandat de Chaban. Crédit photo d'origine : Michel Lacroix. 

 


Cette photo date d'environ 1986, et l'on y voit Jacques Chaban-Delmas, visiblement ravi aux côtés d'une "Miss" locale, inaugurer officiellement la fête foraine semestrielle - qui, aujourd'hui encore, est un spectacle si familier sur l'Esplanade des Quinconces. À en juger par la visibilité des bâtiments à l'arrière-plan, on peut dire qu'il s'agissait de la session d'automne. Sur ma photo 2021, ils sont cachés derrière une dense verdure printanière ! Crédit photo d'origine : Théry.

 


Voici Jacques Chaban-Delmas en fin de carrière, avec sa troisième épouse Micheline (ils se sont mariés en 1971), marchant le long de la rue Naujac dans le quartier de Saint-Seurin-Fondaudège, un jour de scrutin en route pour leur bureau de vote (le couple habitait tout près, rue Émile-Fourcand). La façon dont le couple se tient la main est assez touchant, non ? Crédit photo d'origine : Jean-François Grousset. Merci à Michel Laporte et Patrick Forsans pour m'avoir aidé à identifier le lieu exact de la prise de vue.

 

 

Où mieux terminer cette promenade dans le Bordeaux de Chaban que dans le jardin de l'Hôtel de Ville (essayez de repérer les marches photographiées plus haut dans la page !). Cette photo en couleur, signée Michel André, a orné la couverture du livre original, comme illustré ci-dessous. Remarquez l'étiquette de prix d'un euro. Quelle bonne affaire, hein ? Merci au Quai des Livres !

 
 


> Merci encore à Patrick Forsans et les autres personnes qui ont permis d'identifer deux des lieux ci-dessous, le tout via Twitter et Facebook.

> This article is also available in English. 


0 commentaires: